samedi 14 mars 2015

Utiliser Twitter et découvrir les livres de fêtes

Écrire un mémoire, en 2015, c'est avoir des fichiers multimédias dans ses sources, et c'est utiliser les réseaux sociaux pour trouver de l'aide et de l'interactivité dans ses recherches. Il y a donc une page Facebook associée à ce blog et le hashtag #MémoireTrompette pour suivre l'avancée sur Twitter.



Mais il faut également utiliser le bon côté d'internet pour trouver des pistes qu'on pourrait ignorer à l'aide de spécialistes. Ainsi, Rémi Mathis, conservateur à la Bibliothèque nationale de France spécialisé dans le XVIIe siècle m'a mis sur la piste des livres de fêtes. 

Johanna Daniel, diplômée de l'École du Louvre et de l'École des Chartes m'a également été d'une grande aide.

Puis, c'est Lucie, spécialiste des estampes et apparemment en lien avec l'Institut national d'histoire de l'art qui a rebondi suite à la conversation.



Je ne connaissais pas l'Institut national d'histoire de l'art (INHA) et c'est pourtant sur leur site que j'ai enfin trouvé un magnifique livre de fêtes de 1685 avec les premières représentations trouvées à ce jour de trompettistes au XVIIe siècle dans le cadre de Versailles.  

BERAIN, J. (1685). Carrousel des galans Maures de Grenade entrepris par monseigneur le Dauphin à Versailles, 1685. Lieu : Institut national d'histoire de l'art
Cette première illustration représente le trompette du Duc de Saint-Aignan, maréchal de camp, général du carrousel. Une autre illustration nous montre un Trompette de la quadrille du Dauphin lors de ce même carrousel. 

BERAIN, J. (1685). Carrousel des galans Maures de Grenade entrepris par monseigneur le Dauphin à Versailles, 1685. Lieu : Institut national d'histoire de l'art
Un autre document nous donne la description de cette fête monumentale, le Livre de fête retraçant le Carrousel des galans Maures qui s'est tenu à Versailles en 1685, qui fut publié et vendu le jour même de la fête. Voici ce qui concerne les trompettes : 

"Tout ce qui compose cette pompeuse Cavalcade, doit partir de la seconde Cour du Château, pour se rendre dans la Carriere où l'adresse de tout ce que la France a de plus illustre Noblesse doit paroistre. Deux Trompettes ouvriront la Marche, & seront suivies de Mr du Mont, Major des Quadrilles, sous le nom de Caraman." (BLAGEART, 1685, p. 12)

"Monsieur du Gast, & Monsieur de Neuville, Ecuyers de la Grande Ecurie, marcheront ensuite, portant l'un la Lance de Monseigneur le Dauphin, & l'autre ses Dards. Deux Timbaliers & huit Trompettes suivront ces deux Ecuyers. Leurs Habits doivent estre tres riches, & de la mesme couleur que ceux des Pages, mais d'un dessein diférent." (BLAGEART, 1685, p. 16)

"Aprés qu'on aura demeuré quelque temps en cét état aux fanfares des Trompettes, les Abenserrages défileront deux à deux suivis des Gazules." (BLAGEART, 1685, p. 38)

"Tous les Trompettes & les Timballiers marcheront à leur Teste, & iront se poster aux quatre Angles de la Lice. [...] ce qui fera un tres-bel effet, parce qu'ayant la Lance à la main, & estant disposez comme s'ils estoient sur le point de se combatre, le Maréchal de Camp Genéral marchera vers l'un & vers l'autre Party, comme pour y donner la Paix, & alors ils se mettront en marche pour la Retraite, au mesme ordre qu'ils seront entrez, excepté que le Maréchal de Camp General, ses Trompettes, Timbaliers, Pages, & Estafiers, sortiront les derniers de la Lice, & que la marche se continuëra jusque dans la seconde Cour, où elle aura commencé." (BLAGEART, 1685, pp. 39-40)

Reste à trouver si la musique de ce carrousel a été conservé. Les pièces de Philidor l'Aîné que j'ai trouvées hier et qui datent de cette même année ont-elles été jouées à cette occasion ? On voit en tout cas que le Trompette a un rôle utilitaire de musique militaire pour guider les masses et servir d'ornement aux princes. 

Sources : 

BERAIN, J. (1685). Carrousel des galans Maures de Grenade entrepris par monseigneur le Dauphin à Versailles, 1685. Lieu : Institut national d'histoire de l'art

BLAGEART, Veuve de C. (1685). Livre de fête retraçant le Carrousel des Galans Maures qui s'est tenu à Versailles en 1685. Paris : Chez la Veuve Blageart

vendredi 13 mars 2015

André Danican Philidor, pièces pour trompettes et timbales en 1685


Portrait d'André Danican Philidor, dit "l’aîné" ou "père" (c. 1647-1730), compositeur et musicien de Louis XIV, Ordinaire de la Musique du Roi, copiste et bibliothécaire du monarque. (s.d.). Repéré à https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Andr%C3%A9_Danican_Philidor.jpg?uselang=fr

Appelé Philidor l'Aîné, André Danican Philidor était quinte de cromorne et trompette marine à la Grande Écurie. Il aurait apparemment composé des pièces pour trompettes et timbales qui semblent très difficile à réaliser sur la trompette naturelle. Ce sont des pièces de 1685, rentrant donc en plein dans mon objet d'étude.

  • La Grande Maison - A. Philidor, Pièces de Trompettes et Timballes, 1685
  • La Beaupré - A. Philidor, Pièces de Trompettes et Timballes, 1685
  • Le Menuet difficile - A. Philidor, Pièces de Trompettes ..., um 1680
  • La Lamarche - A. Philidor, Pièces de Trompettes et Timballes, 1685
  • Chaconne Dauphine - A. Philidor, Pièces de Trompettes et Timballes, 1685

Reste à voir si je peux trouver des partitions de ces pièces à la Médiathèque Hector Berlioz, à la Bibliothèque nationale de France ou au Centre de musique baroque de Versailles. Voici une vidéo qui nous permet d'écouter cette musique. Était-elle jouée par les trompettes des plaisirs ou les trompettes de la Grande Écurie ? Le peu de parties différentes de trompettes me ferait pencher pour la première option. 




Arcifano (2010, 25 novembre). Musique de la Grande Écurie & des gardes Suisses - Les Trompettes de la Chambre et des Plaisirs [fichier vidéo]. Repéré à https://www.youtube.com/watch?v=iX89lMH5UyA

D'après Olivier Baumont, elles auraient pu être jouées pour accueillir l'envoyé du shah de Perse en 1715 à Versailles.  "Quelles musiques joua-t-on alors ? Deux recueils de Philidor l'aîné purent fournir une partie de ce répertoire de cérémonie : les Pièces de trompettes et timbales à 2, 3, et 4 parties. Premier livre. Par M. Philidor l'aîné, ordinaire de la musique de la Chambre et de la Chapelle du roi (Paris, Christophe Ballard, 1685), et un volumineux manuscrit : Partition de plusieurs marches et batteries de tambour tant françaises qu'étrangères avec les airs de fifre et de hautbois à 3 et 4 parties et plusieurs marches de timbales et de trompettes à cheval avec les airs du carrousel en 1686 et les appels et fanfares de trompe pour la chasse. Recueilli par Philidor l'aîné, ordinaire de la musique du roi et garde de sa bibliothèque de musique. L'an 1705." (Baumont, 2007, p. 144). Ces pièces seraient conservées à la bibliothèque municipale de Versailles. 

Ce que dit Dauverné (premier professeur au conservatoire) de la trompette au XVIIe siècle

Voici ce que dit François Georges Auguste Dauverné, premier professeur de trompette au Conservatoire de Paris sur la trompette au XVIIe siècle, dans sa Méthode pour la trompette publiée en 1857. 

François Georges Auguste Dauverné [photographie]. (1864). Lieu : Bibliothèque nationale de France
Les trompettistes allemands au XVIIe siècle

"En 1823, la Société des Trompettes et des Timbaliers obtint un privilège de l'empereur Ferdinand II. Ce privilège fut successivement renouvelé par Ferdinand III, Joseph Ier, Charles VI, François Ier et Joseph II, en faveur des Trompettistes savants ou expérimentés qui se distinguaient par une habileté toute particulière à sonner de leurs instruments. Ils possédaient le secret de certains artifices ou coups de langue qu'eux seuls pouvaient pratiquer, et qu'ils ne devaient enseigner qu'aux élèves formés pour l'institution ou association connue sour le nom de Cameradschaft (société des camarades). C'est parmi les membres de ce Gymnase musical que se recrutaient les Trompettes de cour (Hoftrompeter), ceux de la ville (Stadttrompeter), et ceux de l'armée (Feldtrompeter). 
Différents services étaient attribués à ces musiciens. Ils devaient annoncer le repas du souverain, puis exécuter durant ce repas des morceaux guerriers pour trois ou quatre parties de Trompette, lesquels s'appelaient Trinicium ou Quatricinium. La présence de ces artistes était en outre obligatoire dans les processions, dans les assemblées et les tournois où se rendait leur seigneur et maître. Les Trompettes de l'armée jouissaient de grandes prérogatives ; ils étaient très généreusement rétribués, et possédaient des instruments et des montures d'un grand prix." (DAUVERNÉ, 1991, p. 17)

On peut donc voir que les trompettistes allemands du XVIIe siècle obéissent aux mêmes catégories que leurs homologues français. Ils sont à cheval, jouent pour le privilège du prince, ont un rôle de divertissement (à la cour ou à la ville) ou militaire. Enfin, ils jouent pour les cérémonies. 

L'usage de la trompette en France au XVIIe siècle

"Le Cérémonial de France, recueilli par Théodore Godefroy, avocat au Parlement de Paris, et publié en 1619, ne laisse aucun doute sur l'antiquité de l'usage des Trompettes en France. Le lecteur, que nous renvoyons à cet ouvrage pour ne pas nous étendre trop longuement sur le sujet, y verra qu'à toutes les fêtes, tournois, entrées, baptêmes, sacres, funérailles des rois et reines de France, depuis 1467 jusqu'en 1594, les Trompettes figuraient comme de rigueur; et les instrumentistes étaient assimilés au rang des officiers attachés aux maisons royales et à celles des princes. Aussi distinguait-on l'artiste-Trompette de celui qui ne servait que pour attirer la foule du peuple à son de Trompe, et proclamer les ordonnances; car l'usage des affiches n'existait pas alors, vu que l'imprimerie était encore au berceau. [...]
Sous Louis XIV, dit cet auteur, "il y avait des Trompettes dans toutes les compagnies de cavalerie. Le Trompette portait la livrée du roi, du prince ou du colonel, ou mestre de camp, dont les armoiries étaient ordinairement brodées sur l'un des côtés de la banderolle des trompettes, et la devise sur le côté opposé. Le Trompette était entièrement attaché au capitaine, avec obligation de le suivre, non-seulement quand il marchait à la tête de sa troupe ou autre détachement, mais encore partout où il se rendait à cheval pendant qu'il était à l'armée. Il y avait aussi dans chaque régiment un Trompette-major, lequel devait être expert pour le bruit de guerre et pour les fanfares, afin de pouvoir en instruire les autres, et notamment les nouveaux venus. Les Trompettes, dans les marches et les revues, de même que les timbaliers, se tenaient à la tête de l'escadron, à trois ou quatre pas devant le commandant. Comme eux aussi, dans le combat, ils étaient sur les ailes, dans les intervalles des escadrons, pour recevoir les ordres du major ou de l'aide-major. Les différents signaux se transmettaient par des sonneries de Trompettes, qui étaient le Boute-Selle, à cheval, la Marche, l'Appel, la Retraite, et la Sourdine, ainsi nommée, parce qu'elle donnait l'ordre de marcher à petit bruit. Les Trompettes étaient aussi employés comme parlementaires, et, par cette raison, on exigeait d'eux qu'ils fussent des hommes discrets et intelligents. [...]
Sous Louis XIV, les quatre compagnies des Gardes du corps de la maison du Roi avaient chacune sept Trompettes et un Timbalier. Il y avait par compagnie un Trompette qui restait auprès du Roi pour son service particulier, sous le titre de Trompette des plaisirs. Il y avait également un cinquième Timbalier dépendant du corps, qui restait également auprès du Roi sous le même titre. Ce Timbalier marchait à la tête du guet, derrière le carrosse du Roi, battant de ses timbales, comme les Trompettes qui marchaient au devant du carrosse sonnaient de leurs Trompettes. Les quatre Trompettes des plaisirs portaient un habillement magnifique, fourni aux dépens du Roi. Le fond en était de velours bleu, chamarré d'argent plein. On reconnaissant à la couleur de la banderolle de leurs instruments la Compagnie à laquelle chacun d'eux appartenait. Cette couleur distinctive était, pour la première compagnie (dite Écossaise), le blanc, et pour les autres, le vert, le bleu et le jaune." (DAUVERNÉ, 1991, p. 19)

Le Trompette à cheval / artiste anonyme français du 17e siècle [dessin]. (1945-1985). Lieu : Bibliothèque nationale de France

"Les fonctions de ces Trompettes étaient de servir avec le guet du quartier, par exemple dans les voyages, pour accompagner le carrosse du Roi, et de se trouver aux fêtes que le souverain donnait, de même qu'aux cérémonies royales, aux déclarations de guerre, publications de paix, etc. Ils se trouvaient également présents à tous les concerts où il fallait des Trompettes devant le Roi, tant sur le canal de Versailles que dans les appartements du château. Ainsi on les voyait figurer à la représentation des opéras, aux ballets et aux comédies qu'on donnait à la cour; quelquefois même ils accompagnaient le Roi jusque dans la chapelle. Enfin ils étaient encore de service pour la solennité de la veille ou du jour de l'Épiphanie, ainsi qu'il arriva en 1693 et 1694, années où Louis XIV fit les Rois à Versailles avec le Roi d'Angleterre et quelques princes, princesses et dames. Dans tous ces divertissements, les Trompettes des plaisirs avaient le pas sur les Trompettes de la chambre; mais le contraire avait lieu dans d'autres occasions. Ces Trompettes de chambre, que nous venons de citer, faisaient partie de la bande de la Grande Écurie. Ils se joignaient aux quatre Trompettes des plaisirs dans toutes les grandes cérémonies royales, baptêmes, mariages, sacres, funérailles et autres déjà mentionnés ci-dessus ; comme aussi lorsque le Roi allait tenir son lit de justice au Parlement, ou bien quand on portait à Notre-Dame de Paris les drapeaux enlevés aux ennemis.
"Des douze Trompettes de la Grande Écurie, qui se disaient aussi Trompettes de la chambre, le Grand Écuyer en choisissait quatre appelés Trompettes ordinaires de la chambre du Roi, lesquels avaient pour mission particulière de sonner de leurs instruments à la tête des chevaux du carosse royal, principalement dans les voyages, et quand le Roi entrait dans les villes. Toutes les fois que le Dauphin se rendait à l'armée, des quatre Trompettes des plaisirs, deux le suivaient pour exercer auprès de lui les mêmes fonctions qu'ils avaient exercées auprès du Roi. Quant aux autres, ils restaient au service du monarque. Il en était de même des quatre Trompettes de la chambre, dont les fonctions en pareil cas se trouvaient partagées de la même maniére. Ces divers usages, relatifs au service des Trompettes de la cour de France, continuèrent de subsister jusque vers la fin du règne de Louis XIV." (DAUVERNÉ, 1991, p. 19)

PERRAULT C., Courses de testes et de bagues faites par le Roy et seigneurs de sa cour en l'année 1662. (1670). Paris : Imprimerie royale

"Par ordre de Louis XIV, Lully composa des morceaux de Trompette et Timbales à l'usage des carrousels, cérémonies et services particuliers auprès de la personne du Roi, dont un recueil manuscrit formé en 1705, par les soins de Philidor l'ainé, ordinaire de la musique du Roi est conservé à la bibliothèque de la ville de Versailles.
Outre l'usage fréquent de la Trompette, tant dans les armées que pour les cérémonies pompeuses des rois et des princes, elle fut également admise dans la musique de théâtre, de concert, et notamment dans la musique d'église. [...]
La première exhibition des Trompettes dans la musique de théâtre en France eut lieu en 1674, dans l'opéra d'Alceste de Quinault et Lully. Ces instruments avaient figuré déjà sur la scène, où des musiciens, vêtus en costume de théâtre, les mettaient en jeu." (DAUVERNÉ, 1991, p. 20)

Dans la vidéo suivante, nous pouvons entendre l'Air pour le Carrousel de Monseigneur (LWV72) de Jean-Baptiste Lully. Il faudrait voir si je peux trouver la partition quelque part.




Quel répertoire joue-t-on au XVIIe siècle ?

On joue donc au XVIIe siècle un répertoire de cérémonie, l'instrument n'arrivant (en France) dans l'orchestre qu'en 1674. En 1856, Dauverné dit que "la nature de la Trompette ne permettant pas d'en varier beaucoup la musique, qui est extrêmement simple, l'étude simultanée d'un autre instrument, soit le piano, le violon, ou le violoncelle, devra hâter le développement des facultés musicales. J'engagerai donc les jeunes élèves à s'imposer l'obligation d'étudier l'un de ces instruments, concurremment avec la Trompette." (DAUVERNÉ, 1991, p. 55)

On voit donc que même au milieu du XIXe siècle, le répertoire pour trompette est considéré comme pauvre, au point qu'on conseille de jouer d'un autre instrument pour développer sa musicalité. Serait-ce la raison pour laquelle nous ne jouons quasiment que du répertoire postérieur à cette date ?

Sources :

Cum Deo et victribus armis (2010, 27 avril). Lully - Fanfare pour le Carrousel Royal [fichier vidéo]. Repéré à https://www.youtube.com/watch?v=kAOpFAGU3aA

DAUVERNÉ, F.G.A. (1991). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : Éditions International Music Diffusion.

François Georges Auguste Dauverné [photographie]. (1864). Lieu : Bibliothèque nationale de France

PERRAULT C., Courses de testes et de bagues faites par le Roy et seigneurs de sa cour en l'année 1662. (1670). Paris : Imprimerie royale

Le Trompette à cheval / artiste anonyme français du 17e siècle [dessin]. (1945-1985). Lieu : Bibliothèque nationale de France


"Alceste" de Lully, première partition avec trompettes en France ?

La trompette a connu une arrivée tardive en France si l'on en croit le Dictionnaire de la musique en France aux XVIIe et XVIIIe siècles : "Utilisée depuis le XVe s. dans les grandes villes pour les sonneries municipales, elle ne fut intégrée à l’orchestre que par Monteverdi dans l’Orfeo (1607). En France, il fallut attendre la disparition complète du cornet à bouquin et l’arrivée de Lully, qui l’emploie dans Alceste en 1674, pour que son usage et son importance s’accroissent." (BENOîT, 1992, p. 694)



Nous aurions donc une partition du dernier quart du XVIIe siècle composée par Jean-Baptiste Lully, compositeur de musique instrumentale à la cour de Louis XIV depuis 1653 (BENOîT, 1992, p. 415). Alceste serait donc la première oeuvre utilisant, en France, la trompette en mettant cet instrument en avant. Pourtant, la Grande Écurie (et son orchestre de trompettes) existe depuis François Ier (BENOîT, 1992, p. 260) ! Lully avait donc dès son installation à Versailles la possibilité d'écrire pour ces instruments. Il ne le fera que vingt-et-un ans après son arrivée. 

LULLY, J.-B. (1674/1703). Alceste [partition]. Paris : Recueil Philidor
Comme le dit Henry Prunières dans l'édition monumentale conservée à la Médiathèque Hector Berlioz : "les trompettes sont rarement marquées, mais on peut conjecturer qu’elles jouent la partie supérieure quand, à la basse, on voit intervenir les timbales" (PRUNIÈRES, 1932, p. XXII). On voit clairement que les parties en clé de sol première, clés d'ut un, deux et trois concernent des trompettes (ou des trombones ou trompettes graves). Dans cette édition, on peut lire le titre "Bruit de trompette" au lieu de "Prélude de trompette" dans le Recueil Philidor de 1703.

LULLY, J.-B. (1674/1703). Alceste [partition]. Paris : Recueil Philidor



Sur cette vidéo, nous pouvons entendre à quoi ressemblait le passage de cet opéra où l'on peut entendre des trompettes, interprété dans une version se rapprochant de l'esthétique de l'époque, justement par un orchestre nommé La Grande Écurie et la Chambre du Roy dirigé par Jean-Claude Magloire. 

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Sources :

Ouvrages :

Écurie (Grande). In M. BENOîT (Ed.), Dictionnaire de la musique aux XVIIe et XVIIIe siècles (p. 260). Paris : Fayard.

Lully. (1992). In M. BENOîT (Ed.), Dictionnaire de la musique aux XVIIe et XVIIIe siècles (p. 415). Paris : Fayard.

LULLY, J.-B. (1703). Alceste [partition] Paris : Recueil Philidor.

PRUNIÈRES, H. (1674/1932) Préface. In J.-B. LULLY Alceste [partition]. (p. XXII). Paris : Éditions de la revue musicale.

VIGNON, J.-P. (1992). Trompette. In M. BENOÎT (Ed.), Dictionnaire de la musique aux XVIIe et XVIIIe siècles (p. 694). Paris : Fayard.

Vidéos :

Bacholoji (2006, 2 juillet). Monteverdi - L'Orfeo - Savall [fichier vidéo]. Repéré à https://www.youtube.com/watch?v=yxBT1pfVAKQ

Lully's Work (2011, 27 mars). Lully: LWV 50. Alceste - Prologue (1) - Malgoire [fichier vidéo]. Repéré à https://www.youtube.com/watch?v=Os8xNiNNIJI

Quelques documents sur la musique de la grande écurie du roi 

La Grande Écurie du Roi : un lieu où l'on retrouvait différents orchestres dont un orchestre composé uniquement de trompettes. 

VINCK, Carl (de). Collectionneur. (1770-1870). Vue perspective de la Grande et de la petite Ecurie, et des deux Cour du Château de Versailles [estampe]. Lieu : Bibliothèque nationale de France
J'ai donc trouvé aujourd'hui sur le merveilleux site internet JSTOR (Journal Storage) un article de 1901 qui traite des trompettes de la Grande Écurie.










ECORCHEVILLE J. (août 1901) Quelques documents sur la musique de la grande écurie du roi. Sammelbände der Internationalen Musikgesellschaft, 2. Jahrg. H. 4, pp. 608-617
Dans mon mémoire dédié à l'utilité au XXIe siècle de redécouvrir le répertoire pour trompette du XVIIe siècle complètement oublié, cet article va m'aider à bien dégrossir mon sujet et va me donner des pistes de partitions à chercher au Centre de Musique Baroque de Versailles.