"Ce fut une lente construction qui occupa tout le règne. Tout préexistait, certes : les cordes en orchestre (les Vingt-quatre violons), les chanteurs et les instruments de la Chambre, les vents de l'Écurie, les choeurs de la Chapelle, chaque groupe avec ses propres caractéristiques, mais en ordre dispersé. On aimait à opposer des ensembles de hautbois aux violons ; des choeurs de luths aux violes. Il avait fallu les grandes cérémonies extraordinaires, profanes ou religieuses, pour réunir tout ce beau monde : c'était souvent hors des palais de la couronne, les salles ne pouvant recevoir tant de musiciens." (Duron, 2007, pp. 51-52)
"L'orchestre français de la fin du XVIIe siècle se pensait au contraire comme un vaste plein jeu d'orgue où tous les instruments se trouvaient réunis : cordes, bois (flûtes à bec, flûtes traversières, hautbois et bassons) et, si l'on voulait, trompettes et timbales." (Duron, 2007, pp. 53-54)
"La trompette était avant tout un instrument militaire qui par sa puissance convenait aux cérémonies extérieures. Lully avait donné l'exemple en l'employant dans des divertissements et dans ses oeuvres lyriques, et ses successeurs lui réserveront un rôle mais en se souvenant toujours de sa vocation militaire et en l'associant immanquablement aux timbales. Les XVIIe et XVIIIe siècles ne connaissent évidemment que la trompette sans pistons. Fait de cuivre, parfois d'argent, son tube étroit reste cylindrique jusqu'aux deux tiers de sa longueur après quoi il devient conique et se termine par un pavillon évasé. Cette perce cylindrique est à l'origine du son éclatant qui la caractérise. [...] On construisait les trompettes dans des tons différents, mais en France on les rencontre surtout en ut ou en ré. Son étendue est grande mais il s'agit d'un instrument qui ne donne que les harmoniques du son fondamental, si bien que sur les deux premières octaves on ne trouve que peu de notes (pour une trompette en ut : do, sol, do, mi sol, si bémol, do) il faut atteindre la troisième octave pour pouvoir lui confier une gamme diatonique avec en plus quelques chromatismes... et encore certaines notes sont difficilement justes. Les pages où intervient la trompette réclament souvent de gros effectifs. On peut compter trois manières de l'exploiter : 1) fanfares avec jeu sur les premiers harmoniques dans des pièces qui s'apparentent à des marches; 2) phrases mélodiques qui obligent à utiliser l'instrument dans l'aigu, sur la troisième octave; 3) rôle harmonique qui se caractérise par des tenues sur les degrés importants de la tonalité, souvent tonique ou dominante. C'est ce dernier usage qui sera retenu après 1750. Cette fonction harmonique, qui représente une utilisation moderne de la trompette, n'a apparemment pas été pressentie par Lully. Il semble qu'il faille attendre 1693 et Médée de Charpentier pour trouver des tenues de trompettes sur des degrés importants ; néanmoins, un des plus beaux exemples de cette emploi, encore rare à l'époque, se trouve dans le prologue d'Alcine (1705) de Campra." (Lemaître, 2007, pp. 131-132)
(Lemaître, 2007, p. 132) |
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Campra, A. (1705). Alcine [partition]. Paris : Pierre Ribou
Duron, J. (2007). Cette musique charmante du siècle des héros. Les plaisirs de Versailles sous le règne de Louis XIV, 51-78
Duron, J. (2007). Cette musique charmante du siècle des héros. Les plaisirs de Versailles sous le règne de Louis XIV, 51-78
Lemaître, E. (2007). Une discipline d'orchestre. Les plaisirs de Versailles sous le règne de Louis XIV, 113-145
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