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samedi 18 février 2017

"Tempo di Bolero" de François Georges Auguste Dauverné

La fin de la méthode Dauverné (1857, p. 130) comporte six "trios pour trois trompettes à l'unisson et en différents tons". Le dernier d'entre-eux et le plus élaboré s'intitule "Tempo di Bolero"


Dauverné, 1857, pp. 140-141
(source : Gallica/BnF)
Le boléro est une "danse espagnole et plus particulièrement andalouse" qui est "issue de la séguedille" (Boléro, 2005, p. 91). Cette danse est traditionnellement accompagnée de castagnettes. 

Rumoroso, s.d.
(source : Images d'art)
Ici, les castagnettes sont symbolisées par le double coup de langue ou double staccato de la trompette. Voici ce qu'en dit Dauverné (1857, p. 4) : "Le double coup de langue est spécialement compliqué ; et pour qu'il acquière de la netteté et du brillant, il faut d'abord le travailler dans un mouvement modéré, et en accélérer insensiblement la vitesse, jusqu'à ce qu'on arrive à le posséder parfaitement."

Armand, 1861
(source : Images d'art)
Ce coup de langue qui rythme toute la pièce lui donne ce côté coloré. Le staccato très marqué est par ailleurs caractéristique de l'école française de trompette. Néanmoins, ces passages très piqués alternent avec des passages plus chantés. La pièce est écrite pour une astucieuse combinaison de trompette en mi bémol, trompette en ut et trompette en la bémol. J'avoue que quand j'ai enregistré la première partie, je ne m'attendais pas du tout au résultat final de la pièce (c'est difficile d'entendre à la simple lecture des parties en trois tonalités différentes). 




Le résultat est une pièce d'une grande fraîcheur tirant profit des tonalités possibles des trompettes naturelles de l'époque avec beaucoup d'inventivité, laissant chanter tour à tour la trompette en mi bémol et la trompette en la bémol. Au XIXe siècle, l'espagnolisme est tout à fait à la mode. Une oeuvre très populaire à cette époque est la "Symphonie espagnole" d'Édouard Lalo.

Aguado-Bejarano, s.d.
(source : Gallica/BnF)

Sources :

Aguado-Bejarano, M.C. (s.d.). Le boléro [photographie]. Paris, Bibliothèque nationale de France.

Armand, L. (1861). Danses espagnoles [aquarelle gouachée, 275x260]. Paris : Musée du quai Branly - Jacques Chirac. 

Boléro. (2005). Dans M. Vignal (dir.), Dictionnaire de la musique (p. 91). Paris : Larousse. 

Dauverné, F.G.A. (1857). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : G. Brandus, Dufour et Cie.

Rumoroso, E. (s.d.). Danse andalouse [épreuve sur papier albuminé]. Paris : École Nationale Supérieure des Beaux-Arts. 

"Prière du matin" de Johann Ernst Altenburg

La trompette, à l'époque baroque, est l'instrument représentant par excellence le divin. "La trompette naturelle, avec ses accords parfaits majeurs purs, incarnait, dans le monde sonore, l'idéal de la proportion baroque" (Harnoncourt, 1985, p. 90). La méthode Dauverné propose aussi quelques exemples de musique religieuse.

Gigl, 1945-1985
(source : Gallica/BnF)
Les trompettes accompagnaient souvent les cérémonies religieuses officielles de la cour, comme on peut le voir sur ce dessin où les Trompettes de la chambre précèdent Louis XV lors de son sacre. 

Dulin, 1722
(source : Images d'art)

Une partition d'une page est proposée par le professeur du XIXe siècle avec une explication au sujet des sourdines sur les trompettes en ré. Ces dernières montant le son d'un ton, on comprend donc l'emploi de trompettes en ré pour les Clarini 2 et 3. 

Dauverné, 1857, p. XLV
(source : Gallica/BnF)
Mais, étonnamment, il faut jouer toutes les parties sur la même trompette. Dauverné semble en effet avoir transposé les parties de trompette en ré pour qu'elles soient jouées sur le même instrument que les parties extrêmes. Pour jouer cette partition, j'ai choisi une trompette en mi bémol pour les parties extrêmes et une trompette piccolo en si bémol avec sourdine (afin de se rapprocher de l'intention originelle d'Altenburg) pour les parties centrales. 

Jouvenet, 1708-1710
(source : Images d'art)
Ici, les trompettes sont dans une tessiture très aiguë (que nous avons perdue avec l'arrivée des pistons) et expriment clairement un sentiment de plénitude et de calme invitant en effet à la contemplation. Les voix se croisent et se mélangent dans un ensemble très solennel. Il est très probable que la partie grave était doublée à la saqueboute et/ou aux timbales. 






Sources :

Dauverné, F.G.A. (1857). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : G. Brandus, Dufour et Cie.

Dulin, P. (1722). Louis XV, allant à l'église pour son sacre [encre de Chine, rehauts de blanc, lavis d'encre de Chine, dessin à la plume, papier gris]. Paris : Musée du Louvre.

François Frémeau. (2017, 18 février). "Prière du matin" de Johann Ernst Altenburg [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/Lfy_lj--13U

Gigl, H.G. (1945-1985). Ange musicien [photographie]. Paris : Bibliothèque nationale de France.

Harnoncourt, N. (1985). Le dialogue musical : Monteverdi, Bach et Mozart. Paris : Gallimard. 

Jouvenet, J. (1708-1710). La messe du chanoine de La Porte ou le maître autel de Notre-Dame [huile sur toile, 1620x1410]. Paris : Musée du Louvre. 

vendredi 17 février 2017

"Valse" de François Georges Auguste Dauverné

La danse par excellence au XIXe siècle est la valse. "Dans la musique occidentale, la valse est une des rares danses à avoir fait se rejoindre musique savante et sensibilité populaire [...]. On trouve donc des valses absolument partout : dans les bals populaires ou de la haute société" (Valse, 2005, p. 868).

Lami, XIXe siècle
(source : Images d'art)

Or, la trompette à l'époque est encore un instrument ne pouvant jouer que les harmoniques naturelles d'un son (contrairement au cornet qui peut faire l'ensemble du chromatisme mais qui n'est pas encore popularisé dans la première moitié du XIXe siècle). 

Dauverné, 1857, p. XXVII
(source : Gallica/BnF)

Le réservoir de notes est donc limité pour notre instrument. C'est sans compter sur l'inventivité extraordinaire de François Georges Auguste Dauverné, professeur de trompette au Conservatoire de Paris, qui va combiner des trompettes de tonalités différentes pour obtenir une harmonie plus riche et plus complexe. En effet, si je prends les deux premières harmoniques sol et do jouées sur une trompette en si bémol, j'obtiens fa et si bémol. Si je les joue sur une trompette en mi bémol, j'obtiens si bémol et mi bémol. Avec toutes ces combinaisons et quelques harmoniques aiguës pour varier le tout, Dauverné arrive à réaliser une vraie petite valse qui permet à la trompette naturelle de participer au répertoire grand public de son époque. 


Dauverné, 1857, pp. 134-135
(source : Gallica/BnF)

Ce morceau demande de combiner deux trompettes en mi bémol et une trompette en si bémol pour la basse. Je possède des instruments dans ces deux tonalités (bien qu'à pistons) ce qui m'a permis d'essayer cette combinaison proposée par Dauverné. Après un petit solo de trompette en mi bémol, la valse démarre avec de très beaux accords de septième de dominante sforzando et l'emploi très en vogue à l'époque du triple staccato (utilisé notamment dans les polka). À la fin des deux pages, c'est un petit relais entre la trompette si bémol et la trompette mi bémol qui permet de monter la gamme et de reprendre Da Capo

Spindler, 1896
(source : Gallica/BnF)
On imagine les élèves du conservatoire aller jouer dans les kiosques parisiens les dimanches ensoleillés et les passants danser au son des trompettes. Une petite valse assez fière et très française dans l'emploi répété du staccato. 





Sources :

Dauverné, F.G.A. (1857). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : G. Brandus, Dufour et Cie.

François Frémeau. (2017, 17 février). "Valse" de François Georges Auguste Dauverné [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/ycrjguv30JI

Lami, E. (XIXe siècle). Quatre études d'un couple valsant [aquarelle, mine de plomb]. Paris : Musée du Louvre.

Spindler, C. (1896). Valse d'honneur = Ehrentanz [image fixe]. Paris : Bibliothèque nationale de France.

Valse. (2005). Dans M. Vignal (dir.), Dictionnaire de la musique (p. 868). Paris : Larousse. 

"Quatricinium" de Johann Ernst Altenburg

François Georges Auguste Dauverné fut le premier professeur de trompette au Conservatoire Impérial de Musique et de Déclamation de Paris. Dans sa méthode, éditée en 1857, et disponible en intégralité sur Gallica, il fait état des pratiques de l'époque l'ayant immédiatement précédé. Ainsi, il écrit : "Au siècle dernier la manière d'écrire pour la Trompette offre assez de curiosité pour qu'il soit intéressant de reproduire sous les yeux du lecteur quelques fragments authentiques extraits principalement des oeuvres célèbres de Handel, et de l'ouvrage de J. E. Altenburg" (Dauverné, 1857, p. XXVIII). Il est évident que, sous le Second Empire, ces airs de cour de la fin du XVIIIe siècle paraissent pour le moins désuets. 

Rousseau & Rousseau, XVIIIe siècle
(source : Images d'art)

Johann Ernst Altenburg est un compositeur, organiste et trompettiste allemand du XVIIIe siècle. Dauverné tire plusieurs pièces composées par Altenburg dans un ouvrage qui se nommerait "Essai d'une instruction pour l'Art héroïque et musical des Trompettistes" publié à Halle en 1795. Il est vrai que le morceau intitulé "Quadricinium, ou morceau pour 4 Trompettes, du XVIIIe siècle" a un caractère assez héroïque. On peut aisément imaginer qu'il a servi au divertissement extérieur d'une cour allemande à la fin du XVIIIe siècle. 

Dauverné, 1857, p. XXXI
(source : Gallica/BnF)

Je me suis donc amusé à enregistrer cette page de musique vieille de trois siècles. La synchronisation n'est pas optimum, mais on peut se faire une idée de comment cette pièce sonnait. J'ai joué les parties de Clarino I et III sur une trompette piccolo et les parties de Clarino II et IV sur une trompette en ut. Cette répartition entre instruments aigus et instruments graves dans l'écriture ressemble à l'actuelle écriture pour cor dans l'orchestre. Voici donc comment pouvait sonner cette pièce (bien que jouée sur des instruments modernes). L'enregistrement est également disponible sur Soundcloud.




Sources :
Dauverné, F.G.A. (1857). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : G. Brandus, Dufour et Cie.

François Frémeau. (2017, 17 février). "Quatricinium, ou morceau pour 4 Trompettes du XVIIIe siècle" de Johann Ernst Altenburg | Trompette [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/t91FV15_9Cc

Johann Ernst Altenburg. (2016, 21 avril). Wikipédia, l'encyclopédie libre. Page consultée le 12:35, février 17, 2017 à partir de http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Johann_Ernst_Altenburg&oldid=125470849.

Rousseau, J.-H. & Rousseau, J. S. (XVIIIe siècle). Versailles, cabinet de la garde-robe de Louis XVI.

vendredi 13 mars 2015

Ce que dit Dauverné (premier professeur au conservatoire) de la trompette au XVIIe siècle

Voici ce que dit François Georges Auguste Dauverné, premier professeur de trompette au Conservatoire de Paris sur la trompette au XVIIe siècle, dans sa Méthode pour la trompette publiée en 1857. 

François Georges Auguste Dauverné [photographie]. (1864). Lieu : Bibliothèque nationale de France
Les trompettistes allemands au XVIIe siècle

"En 1823, la Société des Trompettes et des Timbaliers obtint un privilège de l'empereur Ferdinand II. Ce privilège fut successivement renouvelé par Ferdinand III, Joseph Ier, Charles VI, François Ier et Joseph II, en faveur des Trompettistes savants ou expérimentés qui se distinguaient par une habileté toute particulière à sonner de leurs instruments. Ils possédaient le secret de certains artifices ou coups de langue qu'eux seuls pouvaient pratiquer, et qu'ils ne devaient enseigner qu'aux élèves formés pour l'institution ou association connue sour le nom de Cameradschaft (société des camarades). C'est parmi les membres de ce Gymnase musical que se recrutaient les Trompettes de cour (Hoftrompeter), ceux de la ville (Stadttrompeter), et ceux de l'armée (Feldtrompeter). 
Différents services étaient attribués à ces musiciens. Ils devaient annoncer le repas du souverain, puis exécuter durant ce repas des morceaux guerriers pour trois ou quatre parties de Trompette, lesquels s'appelaient Trinicium ou Quatricinium. La présence de ces artistes était en outre obligatoire dans les processions, dans les assemblées et les tournois où se rendait leur seigneur et maître. Les Trompettes de l'armée jouissaient de grandes prérogatives ; ils étaient très généreusement rétribués, et possédaient des instruments et des montures d'un grand prix." (DAUVERNÉ, 1991, p. 17)

On peut donc voir que les trompettistes allemands du XVIIe siècle obéissent aux mêmes catégories que leurs homologues français. Ils sont à cheval, jouent pour le privilège du prince, ont un rôle de divertissement (à la cour ou à la ville) ou militaire. Enfin, ils jouent pour les cérémonies. 

L'usage de la trompette en France au XVIIe siècle

"Le Cérémonial de France, recueilli par Théodore Godefroy, avocat au Parlement de Paris, et publié en 1619, ne laisse aucun doute sur l'antiquité de l'usage des Trompettes en France. Le lecteur, que nous renvoyons à cet ouvrage pour ne pas nous étendre trop longuement sur le sujet, y verra qu'à toutes les fêtes, tournois, entrées, baptêmes, sacres, funérailles des rois et reines de France, depuis 1467 jusqu'en 1594, les Trompettes figuraient comme de rigueur; et les instrumentistes étaient assimilés au rang des officiers attachés aux maisons royales et à celles des princes. Aussi distinguait-on l'artiste-Trompette de celui qui ne servait que pour attirer la foule du peuple à son de Trompe, et proclamer les ordonnances; car l'usage des affiches n'existait pas alors, vu que l'imprimerie était encore au berceau. [...]
Sous Louis XIV, dit cet auteur, "il y avait des Trompettes dans toutes les compagnies de cavalerie. Le Trompette portait la livrée du roi, du prince ou du colonel, ou mestre de camp, dont les armoiries étaient ordinairement brodées sur l'un des côtés de la banderolle des trompettes, et la devise sur le côté opposé. Le Trompette était entièrement attaché au capitaine, avec obligation de le suivre, non-seulement quand il marchait à la tête de sa troupe ou autre détachement, mais encore partout où il se rendait à cheval pendant qu'il était à l'armée. Il y avait aussi dans chaque régiment un Trompette-major, lequel devait être expert pour le bruit de guerre et pour les fanfares, afin de pouvoir en instruire les autres, et notamment les nouveaux venus. Les Trompettes, dans les marches et les revues, de même que les timbaliers, se tenaient à la tête de l'escadron, à trois ou quatre pas devant le commandant. Comme eux aussi, dans le combat, ils étaient sur les ailes, dans les intervalles des escadrons, pour recevoir les ordres du major ou de l'aide-major. Les différents signaux se transmettaient par des sonneries de Trompettes, qui étaient le Boute-Selle, à cheval, la Marche, l'Appel, la Retraite, et la Sourdine, ainsi nommée, parce qu'elle donnait l'ordre de marcher à petit bruit. Les Trompettes étaient aussi employés comme parlementaires, et, par cette raison, on exigeait d'eux qu'ils fussent des hommes discrets et intelligents. [...]
Sous Louis XIV, les quatre compagnies des Gardes du corps de la maison du Roi avaient chacune sept Trompettes et un Timbalier. Il y avait par compagnie un Trompette qui restait auprès du Roi pour son service particulier, sous le titre de Trompette des plaisirs. Il y avait également un cinquième Timbalier dépendant du corps, qui restait également auprès du Roi sous le même titre. Ce Timbalier marchait à la tête du guet, derrière le carrosse du Roi, battant de ses timbales, comme les Trompettes qui marchaient au devant du carrosse sonnaient de leurs Trompettes. Les quatre Trompettes des plaisirs portaient un habillement magnifique, fourni aux dépens du Roi. Le fond en était de velours bleu, chamarré d'argent plein. On reconnaissant à la couleur de la banderolle de leurs instruments la Compagnie à laquelle chacun d'eux appartenait. Cette couleur distinctive était, pour la première compagnie (dite Écossaise), le blanc, et pour les autres, le vert, le bleu et le jaune." (DAUVERNÉ, 1991, p. 19)

Le Trompette à cheval / artiste anonyme français du 17e siècle [dessin]. (1945-1985). Lieu : Bibliothèque nationale de France

"Les fonctions de ces Trompettes étaient de servir avec le guet du quartier, par exemple dans les voyages, pour accompagner le carrosse du Roi, et de se trouver aux fêtes que le souverain donnait, de même qu'aux cérémonies royales, aux déclarations de guerre, publications de paix, etc. Ils se trouvaient également présents à tous les concerts où il fallait des Trompettes devant le Roi, tant sur le canal de Versailles que dans les appartements du château. Ainsi on les voyait figurer à la représentation des opéras, aux ballets et aux comédies qu'on donnait à la cour; quelquefois même ils accompagnaient le Roi jusque dans la chapelle. Enfin ils étaient encore de service pour la solennité de la veille ou du jour de l'Épiphanie, ainsi qu'il arriva en 1693 et 1694, années où Louis XIV fit les Rois à Versailles avec le Roi d'Angleterre et quelques princes, princesses et dames. Dans tous ces divertissements, les Trompettes des plaisirs avaient le pas sur les Trompettes de la chambre; mais le contraire avait lieu dans d'autres occasions. Ces Trompettes de chambre, que nous venons de citer, faisaient partie de la bande de la Grande Écurie. Ils se joignaient aux quatre Trompettes des plaisirs dans toutes les grandes cérémonies royales, baptêmes, mariages, sacres, funérailles et autres déjà mentionnés ci-dessus ; comme aussi lorsque le Roi allait tenir son lit de justice au Parlement, ou bien quand on portait à Notre-Dame de Paris les drapeaux enlevés aux ennemis.
"Des douze Trompettes de la Grande Écurie, qui se disaient aussi Trompettes de la chambre, le Grand Écuyer en choisissait quatre appelés Trompettes ordinaires de la chambre du Roi, lesquels avaient pour mission particulière de sonner de leurs instruments à la tête des chevaux du carosse royal, principalement dans les voyages, et quand le Roi entrait dans les villes. Toutes les fois que le Dauphin se rendait à l'armée, des quatre Trompettes des plaisirs, deux le suivaient pour exercer auprès de lui les mêmes fonctions qu'ils avaient exercées auprès du Roi. Quant aux autres, ils restaient au service du monarque. Il en était de même des quatre Trompettes de la chambre, dont les fonctions en pareil cas se trouvaient partagées de la même maniére. Ces divers usages, relatifs au service des Trompettes de la cour de France, continuèrent de subsister jusque vers la fin du règne de Louis XIV." (DAUVERNÉ, 1991, p. 19)

PERRAULT C., Courses de testes et de bagues faites par le Roy et seigneurs de sa cour en l'année 1662. (1670). Paris : Imprimerie royale

"Par ordre de Louis XIV, Lully composa des morceaux de Trompette et Timbales à l'usage des carrousels, cérémonies et services particuliers auprès de la personne du Roi, dont un recueil manuscrit formé en 1705, par les soins de Philidor l'ainé, ordinaire de la musique du Roi est conservé à la bibliothèque de la ville de Versailles.
Outre l'usage fréquent de la Trompette, tant dans les armées que pour les cérémonies pompeuses des rois et des princes, elle fut également admise dans la musique de théâtre, de concert, et notamment dans la musique d'église. [...]
La première exhibition des Trompettes dans la musique de théâtre en France eut lieu en 1674, dans l'opéra d'Alceste de Quinault et Lully. Ces instruments avaient figuré déjà sur la scène, où des musiciens, vêtus en costume de théâtre, les mettaient en jeu." (DAUVERNÉ, 1991, p. 20)

Dans la vidéo suivante, nous pouvons entendre l'Air pour le Carrousel de Monseigneur (LWV72) de Jean-Baptiste Lully. Il faudrait voir si je peux trouver la partition quelque part.




Quel répertoire joue-t-on au XVIIe siècle ?

On joue donc au XVIIe siècle un répertoire de cérémonie, l'instrument n'arrivant (en France) dans l'orchestre qu'en 1674. En 1856, Dauverné dit que "la nature de la Trompette ne permettant pas d'en varier beaucoup la musique, qui est extrêmement simple, l'étude simultanée d'un autre instrument, soit le piano, le violon, ou le violoncelle, devra hâter le développement des facultés musicales. J'engagerai donc les jeunes élèves à s'imposer l'obligation d'étudier l'un de ces instruments, concurremment avec la Trompette." (DAUVERNÉ, 1991, p. 55)

On voit donc que même au milieu du XIXe siècle, le répertoire pour trompette est considéré comme pauvre, au point qu'on conseille de jouer d'un autre instrument pour développer sa musicalité. Serait-ce la raison pour laquelle nous ne jouons quasiment que du répertoire postérieur à cette date ?

Sources :

Cum Deo et victribus armis (2010, 27 avril). Lully - Fanfare pour le Carrousel Royal [fichier vidéo]. Repéré à https://www.youtube.com/watch?v=kAOpFAGU3aA

DAUVERNÉ, F.G.A. (1991). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : Éditions International Music Diffusion.

François Georges Auguste Dauverné [photographie]. (1864). Lieu : Bibliothèque nationale de France

PERRAULT C., Courses de testes et de bagues faites par le Roy et seigneurs de sa cour en l'année 1662. (1670). Paris : Imprimerie royale

Le Trompette à cheval / artiste anonyme français du 17e siècle [dessin]. (1945-1985). Lieu : Bibliothèque nationale de France