mardi 7 mars 2017

Chant de laboureurs traditionnel arménien

Nous connaissons peu, en Europe occidentale, la tradition musicale arménienne. Les trompettistes connaissent un peu l'Arménie à travers le magnifique concerto pour trompette d'Alexandre Aroutiounian qui est très souvent joué et enseigné dans les conservatoires. 

Hovsepian, 2013
(source : licence CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons)

Sur Gallica, se trouve une partition très intéressante de chants traditionnels arméniens : "Musique populaire arménienne. Mélodies et choeurs à cappella, , transcrits et mis en musique par le R. P. Komitas."

Soghomonian, 1930
(source : Gallica/BnF)
Je ne connaissais pas le Père Komitas, mais Wikipedia m'apprend qu'il s'agit d'une sorte de Bartòk arménien. En effet, ce dernier fut l'un des premier à pratiquer l'ethnomusicologie et a aborder une démarche de transcription des musiques traditionnelles afin d'en conserver une trace écrite. "Komitas adopte une démarche méthodique, dans l'observation, allant jusqu'à se cacher pour ne pas altérer l'authenticité des chansons, dans la notation, qui indique jusqu'à la gestuelle." (Komitas, 2016).

Dmitry, 2011
(licence CC BY-NC 2.0, via Flickr)
Ce n'est certes pas une pièce originellement écrite pour trompette, mais notre instrument a une longue tradition (remontant au moins au XVIIe siècle) de transcriptions de musique vocale afin de pallier ce manque de répertoire. Un avant propos de la partition nous apprend ceci du "Chant de laboureurs" que j'ai choisi d'enregistrer : "Le cinquième morceau est un chant de labour recueilli par le Père Komitas au village Vardablour du district de Lori (Arménie Transcaucasienne) et qu'il harmonisa pour choeur mixte et fit exécuter au grand festival de musique arménienne donné par lui à Paris en 1906." (Soghomonian, 1930).

Soghomonian, 1930, p. 13
(source : Gallica/BnF)
La première partie est constituée de solos mis en valeur par des entrées en imitation où ils s'accumulent en se terminant sur des accords parfaits. La voix de ténor est souvent mise en valeur et l'ensemble de la pièce (tripartite) est à cinq temps comme souvent en Europe orientale. 

Soghomonian, 1930, p. 17
(source : Gallica/BnF)
La seconde partie est un choral des trois voix aiguës ponctué par la voix de basse.

Soghomonian, 1930, p. 19
(source : Gallica/BnF)
La troisième partie est très rapide et dansante. C'est celle qui met le plus en valeur le rythme à cinq temps regroupé en 2 et 3. Le Père Komitas semble avoir dédié sa vie à la valorisation du patrimoine traditionnel arménien. Ces témoignages sont précieux et gardent la trace d'une culture populaire de très grande qualité. 

Komitas, 1902
(source : domaine public, via Wikimedia Commons)
Archag Tchobanian nous offre une traduction de ce chant à la fin de la partition originale. Nul doute que les paroles religieuses attirèrent Komitas à l'époque pour transcrire cette musique. L'enregistrement donne lieu à quelques bruits (notamment à cause de la transposition à l'octave basse de la voix grave...) mais donne une idée de la richesse de cette musique. 


J'ai donc fait une exception au fait de n'enregistrer que du répertoire de trompette devant la beauté toute simple de ce choeur. 

Sources : 

Dmitry. (2011). Amberd [photographie].

François Frémeau. (2017, 7 mars). "Chant de laboureurs" transcrit par Soghomon Gevorgi Soghomonian [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/jmSonezV3Ho

Hovsepian, T. (2013). Alexander Harutyunyan [photographie].

Komitas. (2016, 4 décembre). Wikipédia, l'encyclopédie libre. Page consultée le 15:16, mars 7, 2017 à partir de http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Komitas&oldid=132388293.

s.a. (1902). Komitas en 1901/2 [photographie]. 

Soghomonian, S. G. dit Komitas. (1930). Musique populaire arménienne. Mélodies et choeurs à cappella, , transcrits et mis en musique par le R. P. Komitas. Paris : Éditions de la Schola Cantorum.

dimanche 5 mars 2017

La ruralité en musique au XVIIIe siècle

Au XVIIIe siècle, une certaine représentation du monde rural est à l'honneur chez les aristocrates (on songe bien sûr au Hameau de la Reine à Versailles) et les compositeurs accompagnent cette mode pour la ruralité développée notamment par le mythe du bon sauvage chez Diderot ou Rousseau. 

Leprince, XVIIIe siècle
(source : Images d'art)
Jacques Rebour fut flûtiste, hautboïste et compositeur au XVIIIe siècle. Il aurait été maître de musique et ordinaire de la Chapelle de la Reine douairière d'Espagne en 1730. Sur Gallica, nous trouvons un délicieux recueil de 24 pièces intitulé (dans l'orthographe d'époque) "Fanfard nouvelle a deux desus sans Basse convenable pour le Corp de Chasse, Trompette, Haubois, Flute, Violon, et autres Instruments". Jacques Rebour est dit sur la couverture hautboïste des mousquetaires du Roi. 


Norblin de la Gourdaine, 1778
(source : Gallica/BnF)

La première des trois fanfares enregistrée s'intitule (toujours avec l'orthographe de "l'Hauteur") : "Le Vaché de bagnolet".

Rebour, 1730, p. 7
(source : Gallica/BnF)
La façon dont cette musique est supposée évoquer un vacher n'est pas très claire. On joue sur un effet de canon ou d'écho entre les deux voix. On note de très nombreux tremblements (marqués d'un petit + sur la partition), ornementation très à la mode durant la période baroque. 

Rebour, 1730, p. 7
(source : Gallica/BnF)
La dix-septième fanfare se nomme "La Bèrgere". Ici, encore un petit effet de canon mais dans un mouvement plus enjoué qui peut faire penser à une ronde. 

Bergère galante, 1778
(source : Gallica/BnF)


La dernière des trois fanfares enregistrée est un pendant à notre bergère, sobrement intitulée "Le berger".

Rebour, 1730, p. 8
(source : Gallica/BnF)
Ici, on a davantage une écriture à deux voix moins canonique et plus parallèle. L'effet peut faire penser davantage au cor et évoque de vastes vallées où deux bergers converseraient. 

Domenchin de Chavannes, XVIIIe siècle
(source : Images d'art)
Je vous propose donc ce dimanche une petite sortie champêtre au XVIIIe siècle avec l'enregistrement de ces trois morceaux sur une vidéo. 



Sources : 

Domenchin de Chavannes, P.-S. (XVIIIe siècle). Bergers gardant leur troupeau [huile sur toile, 970x840]. Versailles : Châteaux de Versailles et de Trianon.

François Frémeau. (2017, 5 mars). "Le Vacher de Bagnolet" / "La Bergère" / "Le Berger" de Jacques Rebour [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/Ww5NieeILgQ

Leprince, A.-X. (XVIIIe siècle). Vue de Bagnolet [mine de plomb, 86x130]. Paris : Musée du Louvre.

Noblin de la Gourdaine, J.-P. (1778). Un vacher avec un bâton [estampe, 4,3x2,5]. Paris : Bibliothèque nationale de France. 

Rebour, J. (1730). Fanfard nouvelle a deux desus sans basse convenable pour le Corp de Chasse, Trompette, Haubois, Flute, Violon, et autres Instruments. Paris : Chez l'Auteur, Chez le Sieur Boivin et Chez le Sieur le Clerc. 

s.a. (1778). Bergère galante [dessin, encre métallogallique]. Paris : Bibliothèque nationale de France.

mardi 21 février 2017

"Mélodie" de Michele Enrico Carafa

Le Gymnase musical militaire est créé en 1836 pour former des musiciens militaires quand le Conservatoire de Paris ne forme plus que des musiciens civils. L'un des professeurs de cornet qui y enseigna fut Joseph Forestier qui publia en 1844 sa Méthode complète théorique et pratique pour le cornet chromatique à pistons ou cylindres

Forestier, 1844
(source : Gallica/BnF)

Joseph Forestier (1844, p. 4) dresse un portrait du cornet à pistons au milieu du XIXe siècle qui est très intéressant sur la situation historique de l'instrument : "Lorsque je conçus pour la première fois l'idée d'écrire une méthode pour le Cornet à pistons je craignis un instant que l'espèce de défaveur qui s'est attachée a cet instrument ne rendit mon travail inutile: mais convaincu que cette défaveur était encore moins méritée que la vogue exagérée dont le Cornet jouissait naguère ; encouragé d'ailleurs par l'accueil bienveillant du public et les suffrages de Mrs. Rossini, Carafa et Auber, je résolus de poursuivre mon oeuvre, dans l'espoir qu'elle ne serait pas sans utilité pour ceux qui se livrent à l'étude de cet instrument." Il explique en effet qu'on a voulu lui donner le rôle d'une trompette, ce qui était un contre-emploi pour cet instrument à la sonorité ronde et douce. Par ailleurs, le cornet ne possédait à l'époque que deux pistons et "l'imperfection de sa construction première (deux pistons seulement), en le privant de plusieurs notes essentielles, bornait son usage et embarrassait souvent les compositeurs qui voulaient écrire pour le Cornet-à-pistons." (ibid.). 

Maurin, 1840
(source : Gallica/BnF)
Le directeur du Gymnase musical militaire depuis 1838 est Michele Enrico Carafa, prince de Colobrano, naturalisé Français sous Napoléon, qui "eut la malchance de mettre en musique plusieurs livret qui devaient plus tard être repris par Auber, Donizetti ou Marcadante dans des oeuvres dont le succès effaça les siens. Il demeura un peu dans l'ombre de Rossini" (Carafa di Colobrano Michele, 2005). Il offrit néanmoins une très agréable dédicace à la méthode de son professeur. 

Forestier, 1844
(source : Gallica/BnF)
Joseph Forestier eut l'élégance de faire figurer dans sa méthode une mélodie de Carafa, son directeur. Malheureusement, on sent dans l'écriture que ce dernier n'est pas du tout cornettiste tant l'écriture est maladroite (rythmiquement et musicalement). 


Forestier, 1844, pp. 100-101
(source : Gallica/BnF)
C'est néanmoins l'occasion de sortir de l'ombre ce compositeur surtout connu pour ses opéras. La mélodie souffre de ne pas avoir un caractère très fort et on voit bien qu'elle ne sert que de prétexte à démontrer la virtuosité du cornet à pistons. Voici donc cette petite mélodie pour deux cornets qu'il composa en 1844. Je n'ai malheureusement pas pu supprimer certains bruits de pistons. Je m'enregistre avec des écouteurs qui se trouvent donc très près de l'instrument et des différents bruits métalliques qu'il peut produire. 



Sources :

Carafa di Colobrano Michele. (2005). Dans M. Vignal (dir.), Dictionnaire de la musique (p. 133). Paris : Larousse. 

François Frémeau. (2017, 21 février). "Mélodie" de Michele Enrico Carafa [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/KQwdy-IQ0fg

Forestier, J. (1844). Méthode complète théorique et pratique pour le cornet chromatique à pistons ou cylindres. Paris : Bernard Latte. 

Gymnase musical militaire. (2017, 16 février). Wikipédia, l'encyclopédie libre. Page consultée le 21 février 2017 à partir de

Maurin, A. (1840). Michele Enrico Carafa [estampe, 28x22 cm]. Paris : Rosselin. 

samedi 18 février 2017

"Tempo di Bolero" de François Georges Auguste Dauverné

La fin de la méthode Dauverné (1857, p. 130) comporte six "trios pour trois trompettes à l'unisson et en différents tons". Le dernier d'entre-eux et le plus élaboré s'intitule "Tempo di Bolero"


Dauverné, 1857, pp. 140-141
(source : Gallica/BnF)
Le boléro est une "danse espagnole et plus particulièrement andalouse" qui est "issue de la séguedille" (Boléro, 2005, p. 91). Cette danse est traditionnellement accompagnée de castagnettes. 

Rumoroso, s.d.
(source : Images d'art)
Ici, les castagnettes sont symbolisées par le double coup de langue ou double staccato de la trompette. Voici ce qu'en dit Dauverné (1857, p. 4) : "Le double coup de langue est spécialement compliqué ; et pour qu'il acquière de la netteté et du brillant, il faut d'abord le travailler dans un mouvement modéré, et en accélérer insensiblement la vitesse, jusqu'à ce qu'on arrive à le posséder parfaitement."

Armand, 1861
(source : Images d'art)
Ce coup de langue qui rythme toute la pièce lui donne ce côté coloré. Le staccato très marqué est par ailleurs caractéristique de l'école française de trompette. Néanmoins, ces passages très piqués alternent avec des passages plus chantés. La pièce est écrite pour une astucieuse combinaison de trompette en mi bémol, trompette en ut et trompette en la bémol. J'avoue que quand j'ai enregistré la première partie, je ne m'attendais pas du tout au résultat final de la pièce (c'est difficile d'entendre à la simple lecture des parties en trois tonalités différentes). 




Le résultat est une pièce d'une grande fraîcheur tirant profit des tonalités possibles des trompettes naturelles de l'époque avec beaucoup d'inventivité, laissant chanter tour à tour la trompette en mi bémol et la trompette en la bémol. Au XIXe siècle, l'espagnolisme est tout à fait à la mode. Une oeuvre très populaire à cette époque est la "Symphonie espagnole" d'Édouard Lalo.

Aguado-Bejarano, s.d.
(source : Gallica/BnF)

Sources :

Aguado-Bejarano, M.C. (s.d.). Le boléro [photographie]. Paris, Bibliothèque nationale de France.

Armand, L. (1861). Danses espagnoles [aquarelle gouachée, 275x260]. Paris : Musée du quai Branly - Jacques Chirac. 

Boléro. (2005). Dans M. Vignal (dir.), Dictionnaire de la musique (p. 91). Paris : Larousse. 

Dauverné, F.G.A. (1857). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : G. Brandus, Dufour et Cie.

Rumoroso, E. (s.d.). Danse andalouse [épreuve sur papier albuminé]. Paris : École Nationale Supérieure des Beaux-Arts. 

"Prière du matin" de Johann Ernst Altenburg

La trompette, à l'époque baroque, est l'instrument représentant par excellence le divin. "La trompette naturelle, avec ses accords parfaits majeurs purs, incarnait, dans le monde sonore, l'idéal de la proportion baroque" (Harnoncourt, 1985, p. 90). La méthode Dauverné propose aussi quelques exemples de musique religieuse.

Gigl, 1945-1985
(source : Gallica/BnF)
Les trompettes accompagnaient souvent les cérémonies religieuses officielles de la cour, comme on peut le voir sur ce dessin où les Trompettes de la chambre précèdent Louis XV lors de son sacre. 

Dulin, 1722
(source : Images d'art)

Une partition d'une page est proposée par le professeur du XIXe siècle avec une explication au sujet des sourdines sur les trompettes en ré. Ces dernières montant le son d'un ton, on comprend donc l'emploi de trompettes en ré pour les Clarini 2 et 3. 

Dauverné, 1857, p. XLV
(source : Gallica/BnF)
Mais, étonnamment, il faut jouer toutes les parties sur la même trompette. Dauverné semble en effet avoir transposé les parties de trompette en ré pour qu'elles soient jouées sur le même instrument que les parties extrêmes. Pour jouer cette partition, j'ai choisi une trompette en mi bémol pour les parties extrêmes et une trompette piccolo en si bémol avec sourdine (afin de se rapprocher de l'intention originelle d'Altenburg) pour les parties centrales. 

Jouvenet, 1708-1710
(source : Images d'art)
Ici, les trompettes sont dans une tessiture très aiguë (que nous avons perdue avec l'arrivée des pistons) et expriment clairement un sentiment de plénitude et de calme invitant en effet à la contemplation. Les voix se croisent et se mélangent dans un ensemble très solennel. Il est très probable que la partie grave était doublée à la saqueboute et/ou aux timbales. 






Sources :

Dauverné, F.G.A. (1857). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : G. Brandus, Dufour et Cie.

Dulin, P. (1722). Louis XV, allant à l'église pour son sacre [encre de Chine, rehauts de blanc, lavis d'encre de Chine, dessin à la plume, papier gris]. Paris : Musée du Louvre.

François Frémeau. (2017, 18 février). "Prière du matin" de Johann Ernst Altenburg [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/Lfy_lj--13U

Gigl, H.G. (1945-1985). Ange musicien [photographie]. Paris : Bibliothèque nationale de France.

Harnoncourt, N. (1985). Le dialogue musical : Monteverdi, Bach et Mozart. Paris : Gallimard. 

Jouvenet, J. (1708-1710). La messe du chanoine de La Porte ou le maître autel de Notre-Dame [huile sur toile, 1620x1410]. Paris : Musée du Louvre. 

vendredi 17 février 2017

"Valse" de François Georges Auguste Dauverné

La danse par excellence au XIXe siècle est la valse. "Dans la musique occidentale, la valse est une des rares danses à avoir fait se rejoindre musique savante et sensibilité populaire [...]. On trouve donc des valses absolument partout : dans les bals populaires ou de la haute société" (Valse, 2005, p. 868).

Lami, XIXe siècle
(source : Images d'art)

Or, la trompette à l'époque est encore un instrument ne pouvant jouer que les harmoniques naturelles d'un son (contrairement au cornet qui peut faire l'ensemble du chromatisme mais qui n'est pas encore popularisé dans la première moitié du XIXe siècle). 

Dauverné, 1857, p. XXVII
(source : Gallica/BnF)

Le réservoir de notes est donc limité pour notre instrument. C'est sans compter sur l'inventivité extraordinaire de François Georges Auguste Dauverné, professeur de trompette au Conservatoire de Paris, qui va combiner des trompettes de tonalités différentes pour obtenir une harmonie plus riche et plus complexe. En effet, si je prends les deux premières harmoniques sol et do jouées sur une trompette en si bémol, j'obtiens fa et si bémol. Si je les joue sur une trompette en mi bémol, j'obtiens si bémol et mi bémol. Avec toutes ces combinaisons et quelques harmoniques aiguës pour varier le tout, Dauverné arrive à réaliser une vraie petite valse qui permet à la trompette naturelle de participer au répertoire grand public de son époque. 


Dauverné, 1857, pp. 134-135
(source : Gallica/BnF)

Ce morceau demande de combiner deux trompettes en mi bémol et une trompette en si bémol pour la basse. Je possède des instruments dans ces deux tonalités (bien qu'à pistons) ce qui m'a permis d'essayer cette combinaison proposée par Dauverné. Après un petit solo de trompette en mi bémol, la valse démarre avec de très beaux accords de septième de dominante sforzando et l'emploi très en vogue à l'époque du triple staccato (utilisé notamment dans les polka). À la fin des deux pages, c'est un petit relais entre la trompette si bémol et la trompette mi bémol qui permet de monter la gamme et de reprendre Da Capo

Spindler, 1896
(source : Gallica/BnF)
On imagine les élèves du conservatoire aller jouer dans les kiosques parisiens les dimanches ensoleillés et les passants danser au son des trompettes. Une petite valse assez fière et très française dans l'emploi répété du staccato. 





Sources :

Dauverné, F.G.A. (1857). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : G. Brandus, Dufour et Cie.

François Frémeau. (2017, 17 février). "Valse" de François Georges Auguste Dauverné [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/ycrjguv30JI

Lami, E. (XIXe siècle). Quatre études d'un couple valsant [aquarelle, mine de plomb]. Paris : Musée du Louvre.

Spindler, C. (1896). Valse d'honneur = Ehrentanz [image fixe]. Paris : Bibliothèque nationale de France.

Valse. (2005). Dans M. Vignal (dir.), Dictionnaire de la musique (p. 868). Paris : Larousse. 

"Quatricinium" de Johann Ernst Altenburg

François Georges Auguste Dauverné fut le premier professeur de trompette au Conservatoire Impérial de Musique et de Déclamation de Paris. Dans sa méthode, éditée en 1857, et disponible en intégralité sur Gallica, il fait état des pratiques de l'époque l'ayant immédiatement précédé. Ainsi, il écrit : "Au siècle dernier la manière d'écrire pour la Trompette offre assez de curiosité pour qu'il soit intéressant de reproduire sous les yeux du lecteur quelques fragments authentiques extraits principalement des oeuvres célèbres de Handel, et de l'ouvrage de J. E. Altenburg" (Dauverné, 1857, p. XXVIII). Il est évident que, sous le Second Empire, ces airs de cour de la fin du XVIIIe siècle paraissent pour le moins désuets. 

Rousseau & Rousseau, XVIIIe siècle
(source : Images d'art)

Johann Ernst Altenburg est un compositeur, organiste et trompettiste allemand du XVIIIe siècle. Dauverné tire plusieurs pièces composées par Altenburg dans un ouvrage qui se nommerait "Essai d'une instruction pour l'Art héroïque et musical des Trompettistes" publié à Halle en 1795. Il est vrai que le morceau intitulé "Quadricinium, ou morceau pour 4 Trompettes, du XVIIIe siècle" a un caractère assez héroïque. On peut aisément imaginer qu'il a servi au divertissement extérieur d'une cour allemande à la fin du XVIIIe siècle. 

Dauverné, 1857, p. XXXI
(source : Gallica/BnF)

Je me suis donc amusé à enregistrer cette page de musique vieille de trois siècles. La synchronisation n'est pas optimum, mais on peut se faire une idée de comment cette pièce sonnait. J'ai joué les parties de Clarino I et III sur une trompette piccolo et les parties de Clarino II et IV sur une trompette en ut. Cette répartition entre instruments aigus et instruments graves dans l'écriture ressemble à l'actuelle écriture pour cor dans l'orchestre. Voici donc comment pouvait sonner cette pièce (bien que jouée sur des instruments modernes). L'enregistrement est également disponible sur Soundcloud.




Sources :
Dauverné, F.G.A. (1857). Méthode pour la trompette : précédée d'un précis historique sur cet instrument en usage chez les différents peuples depuis l'antiquité jusqu'à nos jours. Paris : G. Brandus, Dufour et Cie.

François Frémeau. (2017, 17 février). "Quatricinium, ou morceau pour 4 Trompettes du XVIIIe siècle" de Johann Ernst Altenburg | Trompette [Vidéo en ligne]. Repéré à https://youtu.be/t91FV15_9Cc

Johann Ernst Altenburg. (2016, 21 avril). Wikipédia, l'encyclopédie libre. Page consultée le 12:35, février 17, 2017 à partir de http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Johann_Ernst_Altenburg&oldid=125470849.

Rousseau, J.-H. & Rousseau, J. S. (XVIIIe siècle). Versailles, cabinet de la garde-robe de Louis XVI.